Je ne vais pas jouer le rabat-joie, le détracteur ou le vieux con qui refuse l’évolution. On ne lutte pas contre le progrès de toute façon, c’est peine perdue, alors mieux vaut avancer gentiment à ses côtés et profiter de ce qu’il peut nous apporter. Néanmoins, mon cheval de bataille, aujourd’hui, est plus précisément la vérité des faits dans l’information. Relater la réalité – à titre professionnel et même particulier – commence par être honnête avec soi-même et c’est déjà là que tout part en sucette, ma pauvre Lucette…
La faute à qui ? Aux utilisateurs à qui l’on met entre les mains des outils pour corrompre leur honnêteté ou aux créateurs de ces nouvelles technologies qui ont bien réfléchi aux usages et aux tentations qu’allaient entrainer leurs superbes inventions ?
Les deux mon Capitaine, évidemment ! À la tête de tout cela : l’iA, l’intelligence artificielle. Formidable invention qui fait autant fantasmer, qu’elle fou les jetons. Elle reste cependant profondément utile aux domaines de la santé, de l’éducation, de l’industrie, de la stratégie militaire, de la domotique, de l’informatique, du commerce et de tant d’autres secteurs d’activité. Mais soyons lucides, l’iA possède de sacrés côtés obscurs.
Le sujet prend ainsi une dimension préoccupante dans notre quotidien, pour le travail, notre vie personnelle, amicale, familiale et même sentimentale. Quand on voit que certains se mentent déjà à eux-mêmes, rien qu’en se prenant en photo avec leur téléphone et en s’attribuant des décennies en moins, comment voulez-vous que le reste file droit ?
L’éthique de l’iA et les tics de l’Homme
Qu’il y ait une gouvernance pour surveiller et régir toutes les applications basées sur l’intelligence artificielle est une évidence. C’est tout le travail de l’Europe, de l’Unesco et de l’AI Act, le premier projet de loi globale sur l’intelligence artificielle dans le monde. Ils vont avoir du boulot tous ces cerveaux – bien intentionnés, je l’espère – pour aborder avec discernement les thèmes de la manipulation des opinions, des risques de crash d’avion, d’accidents mortels dus à des voitures autonomes ou encore celui des Deepfakes qui envahissent déjà les réseaux sociaux. Les Deepfakes, ce sont ces vidéos entièrement générées par l’iA, qui vont sérieusement semer le doute dans nos têtes et jouer sur la crédulité des gens.
La liste des biais et dangers de l’intelligence artificielle est très longue et nous n’en sommes qu’au début. Comment va se comporter l’Homme avec cette technologie à portée de main ? Certains prédisent le chao, d’autres un effet Boomerang en faveur d’un retour aux vraies choses de la vie, tandis que d’autres pensent déjà à tout le business qui va pouvoir glisser entre leurs doigts. Que dire de tout cela, autre qu’attendre des lois, des contrôles, des peines et d’incontournables passe-droits ?
Pourquoi être pessimiste sur l’utilisation que l’Homme va faire de l’iA ?
Envisager un usage modéré de cette technologie, alors même qu’elle peut améliorer considérablement nos vies, ne me semble pas gagné d’avance. Seules nos valeurs peuvent modérer notre tentation d’en user et d’en abuser surtout. Prenons un exemple bon enfant et tellement populaire : le selfie.
Grâce aux smartphones, oubliez la notion de laideur, de l’impact du temps, des rides et des cheveux blancs, et même les visages ternes. Tout cela appartient désormais au passé. Aujourd’hui, tout le monde se ressemble grâce à l’iA et à sa collection infinie de filtres d’embellissement. Nous avons tous 20 ans et nous sommes rayonnants, réduits en pixels. Preuve que certains tombent dans la spirale d’une séduction virtuelle facile, avec une mode qui persiste et m’exaspère profondément. C’est ainsi qu’on a vu fleurir des bouches en cul de poule, d’autres qui partent en vrille sur le côté, comme pour nous faire croire qu’une réflexion, qui va changer le monde, est en cours d’accouchement. Faut croire que la réalité fait peur pour la masquer avec autant de filtres de « beauté » sur les photos ou les vidéos. Je mets des guillemets, car avoir une peau de poupée, ultra-lissée et boostée au collagène pixélisé, perso, je trouve cela moche et même suspicieux, du coup.
Nous voilà donc tous identiques, avec la même peau, le même visage et les mêmes expressions. Finis les vieux et les moches : vive un nouveau monde qui se gargarise de mensonges !
ChatGPT : vous ne savez pas écrire ? Attribuez-vous la plume d’un écrivain !
Ben voilà, un problème, une solution ! Avec ChatGPT, faites croire à tout le monde que vous savez écrire, que vous ne faites aucune faute d’orthographe, que votre rédaction est fluide, que votre contenu est vérifiable sur beaucoup de sites, donc que vous instruit, et que votre sincérité est légitime, puisque vous allez vous attribuer, en toute impunité, une bonne partie de ce texte entièrement généré par l’iA, voire l’entièreté de l’article, tel qu’il vous aura été livré. C’est ainsi que des publications, aujourd’hui, sont automatiquement créées, mais aussi des articles de presse, des discours politiques, des lettres d’amour, des CV, des thèses et même des romans, ce qui pose problème aux maisons d’édition qui doivent désormais mettre en place des systèmes de reconnaissance automatique de ChatGPT, qu’ils ont bien sûr dans le collimateur.
Auteur de guides touristiques et ambassadeur de l’Auvergne et du Portugal, mon défi quotidien est de faire rêver, car c’est mon Job, tout en restant fidèle à la réalité. Un équilibre délicat, qui ne peut reposer que sur mes compétences techniques, ma sensibilité personnelle et mes valeurs, bien ancrées et incorruptibles. Bien sûr qu’avec deux ou trois filtres appliqués sur mes photos, chaque lieu que je dévoile pourrait passer de beau à féérique. Mais qu’en adviendra-t-il une fois que mes lecteurs se rendront sur place, avec en tête l’idée de retrouver ce que je leur ai vendu malhonnêtement sur le papier ? Un effet soufflet les envahira, avec un peu de rancœur aussi, et ce serait compréhensible. Ils auraient en effet été bernés par de la poudre de perlimpinpin, aveuglant totalement leur discernement. Alors les filtres, non merci, pas pour moi. Je me contente de retoucher les contrastes et parfois le piqué…
Un nouveau métier va éclore : Justicier iA !
Comment j’imagine le monde de demain ? Eh bien, avec des justiciers iA, qui scruteront le web à la loupe, à la recherche de délinquants de l’information. Autre peur, qui n’engage que moi, là encore : voir naître une société qui ne réfléchit plus, qui se contente de se gaver d’informations et d’infox – en son âme et conscience – mais qui ne prendra plus pour autant, le temps d’analyser, de comprendre et de se faire une option personnelle. L’influence de la désinformation fait déjà des ravages de nos jours, avec des stratégies méticuleusement déployées sur un maillage composé de centaines de sites traduits dans le monde entier. On nous a dévoilé récemment ce type d’attaques au sujet des punaises de lit sur Paris, mais cela touche déjà énormément le monde politique, pour influencer les votes en ciblant des proies très vulnérables : nous ! Vous pensez que je suis trop pessimiste, sombre ou complotiste ? Je me contente de partager ma vision de la société d’aujourd’hui et de demain et de projeter l’impact que l’iA aura sur nous. L’iA, je ne la diabolise pas, je l’apprécie, je l’admire, je l’utilise dans ma vie personnelle et professionnelle, et je continuerai de l’utiliser, mais en pleine conscience cependant, sans lui donner le contrôle de mon libre arbitre.
Alors d’après vous, iA du soucis à s’faire avec cette iA, qu’une minuscule poignée de personnes seulement, pourra contrôler… ou pas ?
Cet article vous a plu, vous a choqué ou révolté ? Ça tombe bien, parlons-en, car votre avis m’intéresse, pour faire évoluer le mien.
Je suis photographe, rédacteur indépendant et auteur de guides touristiques. J’aime porter un regard sur le monde d’aujourd’hui et de demain. Je suis curieux de notre évolution à tous et de la société dans laquelle on évolue. Alors je partage ma vision des choses, en ayant parfaitement conscience de ne pas détenir la vérité sur grand chose. Échanger, débattre et écouter les autres, c’est un chemin pertinent pour évoluer personnellement !
Marc Nevoux